Paris, 1er octobre 2020 – A l’intention des trois auteures de Ne nous libérez pas, on s’en charge
Bonjour !
Je me permets par cette lettre de vous féliciter pour votre publication récente.On appréciera dans ce travail d’équipe l’érudition, l’étendue du champ d’études, l’impressionnante documentation ainsi que les développements sur « Les voix des féministes de couleur », rarement disponibles dans ce genre d’ouvrage. Et bravo pour la présentation agréable, notamment l’insertion des références dans la page.
En revanche les lectrices attachées à la notion de culture féministe déploreront de notables omissions. Pour ma part je me bornerai à dénoncer le silence des autrices sur la personne de Marie Jo Bonnet, qui ne figure pas dans cet ouvrage érudit, hormis deux notes dans le corps du texte. On la chercherait en vain dans l’index et dans la bibliographie. C’est une omission à la fois injuste et injustifiée. M. J. Bonnet milite activement depuis son engagement dans le Mouvement en 1971. Elle n’a cessé de prendre part aux actions du MLF, notamment par des initiatives telles que « Le café des femmes à la Coupole » qu’elle a animée de 2014 à 2017. Elle a été partie prenantes d’étapes essentielles, les Gouines rouges, Musidora, le GEF.
Enfin je me demande comment il est possible d’éliminer d’un vaste projet sur l’Histoire des féminismes en France l’auteure d’environ dix-huit ouvrages sur les femmes. Je ne citerai que les plus intéressants : Les femmes dans l’art 2004, Editions de La Martinière. Les femmesartistes dans les avant-gardes 2006, Odile Jacob. Les relations amoureuses entre les femmes 1981, réédité en 1995 Odile Jacob. Adieu les rebelles 2014, Flammarion. Mon MLF , 2018, Albin Michel.
Je doute que vos lecteurs et lectrices se contentent de l’indication « bibliographie non exhaustive » pour expliquer votre silence. Quelques soient les réserves qu’on peut émettre sur ses travaux il n’est pas acceptable d’occulter l’œuvre et l’action de M.J Bonnet dans le paysage culturel du féminisme français
L’apparition et le développement du FHAR furent si rapides que nul ne se soucia d’analyser les raisons pour lesquelles son mode d’action principal fut le sabotage. Nous gambadions comme des enfants qui, en guise de ballons, auraient joyeusement brandi des bombes à hydrogène. En effet, de par notre lutte contre la famille et contre une sexualité biologisée, nous étions le désordre, l la catastrophe, l’événement explosif caractéristique d’une métamorphose par et dans la désintégration.
Notre premier slogan, déjà, mettait en lumière ce trait fondamental : NOUS SOMMES UN FLÉAU SOCIAL !
Ainsi la force du FHAR devait essentiellement résider dans sa capacité de refus. Nous n’étions jamais aussi déterminés que lorsque nous décidions d’aller perturber manifestations et discours de ceux dont la parole rencontre l’approbation d’un groupe social, quel qu’il soit, médecins, prêtres, hommes politiques, tout nous était bon.
Il n’est donc pas surprenant que nous nous soyons retrouvés assez nombreux salle Pleyel où Ménie Grégoire avait organisé une émission sur l’homosexualité, transmise en direct sur Europe n°I. Ce dernier point surtout nous intéressait car nous étions décidés à passer sur les ondes; Filles et garçons s’étaient d’abord sagement installés aux premiers rangs de la salle où abondaient retraités des deux sexes et bourgeoises désœuvrées dans la mesure où l’émission, style Aujourd’hui Madame, avait lieu dans l’après-midi…. »
L’histoire de la prison de Pont-L’Evêque sous l’Occupation est restée aussi taboue que celle des internements de prisonniers pendant la bataille de Normandie. Pourtant, je savais par la mémoire familiale (famille Letac) que le docteur Grandrie y avait été interné après son arrestation par la police allemande le 9 décembre 1941. J’avais également découvert aux archives du Service Historique de la Défense (SHD) de Caen, la liste manuscrite des « Détenus par l’autorité allemande ». Mais personne ne voulait en entendre parler.
Mais la vérité fait son chemin.
Toni Mazzotti, petit fils d’un pontépiscopien qui avait caché des aviateurs alliés en 1943, a commencé des recherches et découvert qu’un grand nombre d’entre eux avaient été arrêtés lors du Débarquement et internés dans l’école de garçons. Certains ont été tués d’autres transférés en Allemagne. Toni Mazzotti est à l’initiative de deux plaques commémoratives. Une installée en 2018 à l’école de garçons en souvenir des soldats alliés emprisonnés rue Thouret (Ouest-France 24-8-2018) et une autre derrière le cinéma en 2019, avec la liste des 38 soldats morts pendant la bataille de Pont-L’Evêque. Il racontera ses recherches pour identifier les prisonniers de l’école.
D’autres enfants de Pont-L’Evêque ont voulu savoir. Des enfants porteurs de mémoire, comme Raymonde Virroy dont le père avait aussi secouru des parachutistes anglais le 6 juin 1944 (Ouest-France du 2-6-2021). La « Joyeuse prison » de Pont-L’Evêque ne peut plus occulter ce qui s’est passé avant.
Les recherches font apparaître l’importance de Pont-L’Evêque dans la politique allemande d’internement puisqu’on y dénombre près de 1.200 prisonniers. Près de 150 résistants à la prison sous l’Occupation et 1.000 résistants et aviateurs à l’école de garçons à partir du 6 juin 1944.
La liste des détenus par les Autorités Allemandes à la prison est datée à la fin du 20 août 1944, juste avant l’arrivée de l’armée alliée, de l’incendie de la ville et des combats pour la Libération. La liste a donc survécu à l’incendie et l’on peut supposer qu’il en est de même des archives.
Le collages, La femme dans la Cité (1976) est actuellement exposé à la galerie Arnaud Lefebvre, rue des Beaux-arts à Paris dans le cadre de l‘Hommage à Aline Dallier, grande pionnière de la critique et de l’histoire de l’art des femmes.
Rencontre à la Galerie Arnaud Lefèbvre, rue des Beaux Arts à Paris, le 9 mars 2022, dans le cadre de l’Hommage à Aline Dallier (1927-2020), pionnière de la critique artistique féministe et historienne de l’art des femmes. Commissaire de l’exposition, Diana Quinby.
Interventions des artistes et historiennes d’art: Christine de Buzon pour le groupe Femmes/arts et Françoise Eliet, Cristina Martinez, Mathilde Ferrer, Thérèse Ampe-Jonas, Eugénie Dubreuil, Françoise Py, Anouk Chambart, ean-Clarence Lambert, Claude Bauret-Allard, Danièle Blanchelande, Liliane Camier, Dorothée Selz, Vincent Enjalbert.
Un catalogue est édité. Avec les exposantes : Thérèse Ampe-Jonas, Claude Bauret Allard, Danièle Blanchelande, Bernadette Bour, Charlotte Calmis, Liliane Camier, Christiane de Casteras, Colette Deblé, Françoise Eliet, Esther Ferrer, Monique Frydman, Aline Gagnaire, Hessie, Sara Holt, Françoise Janicot, Monique Kissel, Maria Klonaris et Katerina Thomadaki, Marie-Rose Lortet, Léa Lublin, Milvia Maglione, Cristina Martinez, Vera Molnar, ORLAN, Aline Ribière, Dorothée Selz, Nancy Wilson-Pajic, Nil Yalter.
et les témoignages de personnes qui ont connu Aline Dallier-Popper :(Dominique Berthet, Marie-Jo Bonnet, Christine de Buzon, Daniel Danétis, Fabienne Dumont, Mathilde Ferrer, Jean-Clarence Lambert, Gilbert Lascault, Gloria Orenstein, Françoise Py, ainsi que de plus jeunes chercheurs-euses pour qui les écrits d’Aline Dallier ont été importants (Zélia Bajaj, Anouk Chambard, Vincent Enjalbert, Franny Tachon). Le catalogue intègre également la version intégrale d’une interview d’Aline Dallier, réalisée en 2009 par Diana Quinby. Dans un entretien récent, l’artiste Tania Mouraud raconte sa longue relation amicale avec Aline Dallier, qui remonte au début de leurs carrières respectives.
« Messieurs, laissez-moi, vous allez me tuer ! » La mort de Jean Desbordes, alias Duroc
« Même le soleil a des taches. Votre cœur n’en a pas. Chaque jour vous me donnez ce spectacle : votre surprise d’apprendre que le mal existe. » Cocteau, Dédicace d’Opium à Jean Desbordes, 1930.
En février 1927, Jean Desbordes entre à l’hôtel de la Madeleine pour « prendre possession » de la chambre n°6 dans laquelle il va bientôt retrouver Cocteau pour une première nuit d’amour. Le fantôme de Radiguet est encore là et dans la lettre qu’il lui adresse, Desbordes commence par le rassurer en disant : « Je suis entré dans cette chambre davantage en pèlerin qu’en amant ». Il connaît la force du lien qui a unit Cocteau au disparu. Mais lui, Desbordes, est vivant. « J’ai voulu avant tout, en entrant, t’écrire et dire mon émotion avant mon amour », poursuit-il, avant de conclure sur cette note pleine d’espoir dans l’avenir : « La vie commence. Elle ne paraît que beauté, clarté, silence. Que le lit sera doux avec toi. Je t’attends et tu es dans mon cœur[1]. »
Desbordes a tout juste vingt ans. Né le 3 mai 1906 à Rupt en-Moselle dans une famille protestante, il a été élevé par sa mère et ses sœurs après la disparition de son père Eugène en 1920 des suites de la guerre de 1914. Il se cherche. Il a fait son service militaire tout à côté de la Madeleine, au Ministère de la Marine avenue Royale, où il occupait la fonction de matelot télégraphiste. Il a écrit à Cocteau pour lui parler de ses textes. Ce dernier lui répond le 6 juillet 1925, le lendemain de son anniversaire, date qui va devenir fatidique dans la vie de Desbordes, comme la Madeleine dont le nom ponctue mystérieusement sa destinée.
Pour l’instant, « le marin » est un beau jeune homme, à la tête d’ange, comme en témoignent ses photos ou plus tard, celles de Jean Cocteau pour son film Le sang d’un poète. « Jean-Jean », le petit nom de Desbordes, est habillé en marquis Louis XV. Cocteau a pris fait et cause pour celui qui s’était présenté à lui comme un jeune écrivain. Le jeune homme souhaite s’élancer dans une carrière littéraire, encouragé par Cocteau qui lui a écrit « Dieu me donne une tache : Ton œuvre ». Il va partager la vie de Cocteau pendant sept ans et accepter toutes ses frasques. Yvon Belaval raconte qu’ils « se déguisaient en marins, couraient les bals populaires, stupéfiant les patrons des établissements par des pourboires excessifs[2]. » Années fécondes pour Desbordes qui démarre sa carrière en fanfare avec la publication en juin 1928 de son essai J’adore, aux éditions Grasset. Suivront Les Tragédiens, en 1931 toujours chez Grasset, et une pièce de théâtre La mue en 1935…… (suite dans Les Forcenés)
[1] Lettre inédite de Jean Desbordes à Jean Cocteau, datée de 1927, dactylographiée et signée au crayon. Archives Étienne Grannet-Desbordes que je remercie chaleureusement pour m’avoir si généreusement donné accès à la correspondance de son oncle Jean avec Cocteau et sa famille. Une édition de cette correcpondance inédite est en préparation.
[2] Yvon Belaval, « La rencontre avec Jean Cocteau », Cahiers Jean Cocteau, 3, NRF Gallimard, 1972, p. 75.
Après la remise en question de la
maternité obligatoire par les féministes dans les années 1970,
après la conquête, pour la première fois de l’histoire, de la maîtrise
de leur fécondité par les femmes elles-mêmes, on assiste à un retour en force
de l’injonction à la maternité par un marché de l’assistance à la procréation
de plus en plus puissant. Mais ce retour se fait de manière très paradoxale par
la disparition du mot mère au profit de sigles tels que GPA ou PMA.
On peut
même se demander, questionne Marie-Jo
Bonnet, s’il ne s’agit pas d’une forme de matricide délibérée, qui
s’attaque à la puissance maternelle des femmes. En même temps, les femmes
déclarées stériles ou infertiles ou celles qui ne veulent pas faire d’enfants
subissent encore une sorte d’opprobre sociale. Comment en est-on arrivé
là ? Quelles réponses apporter ? Marie-Jo Bonnet vient nous rappeler
que la maternité ne se réduit pas à la seule dimension biologique.
Après la remise en question de la
maternité obligatoire par les féministes dans les années 1970,
après la conquête, pour la première fois de l’histoire, de la maîtrise
de leur fécondité par les femmes elles-mêmes, on assiste à un retour en force
de l’injonction à la maternité par un marché de l’assistance à la procréation
de plus en plus puissant. Mais ce retour se fait de manière très paradoxale par
la disparition du mot mère au profit de sigles tels que GPA ou PMA.
On peut
même se demander, questionne Marie-Jo
Bonnet, s’il ne s’agit pas d’une forme de matricide délibérée, qui
s’attaque à la puissance maternelle des femmes. En même temps, les femmes
déclarées stériles ou infertiles ou celles qui ne veulent pas faire d’enfants
subissent encore une sorte d’opprobre sociale. Comment en est-on arrivé
là ? Quelles réponses apporter ? Marie-Jo Bonnet vient nous rappeler
que la maternité ne se réduit pas à la seule dimension biologique.
La maternité symbolique a
toujours existé : mettre au monde des idées, des œuvres d’art, des livres,
l’enfant intérieur ; aider à grandir, prendre soin de l’autre, guérir les
âmes… la culture patriarcale le sait qui a limité cette maternité symbolique
aux figures de Vierges rédemptrices et miséricordieuses, entretenant la
séparation entre le corps (maternel) et l’esprit (divin). Ce qui explique
pourquoi la maternité symbolique est si peu connue…
Si on a pu croire que l’accès des femmes à la maitrise de leur fécondité allait permettre de vivre enfin la libre maternité, il a fallu déchanter. Les techniques de procréation artificielle ont repris le contrôle du corps des femmes, réactivant la hantise de la stérilité tout stigmatisant les femmes qui n’ont pas d’enfants.
Des cultes aux déesses mères à la
maïeutique Socratique, en passant par Thérèse d’Avila, Jeanne Guyon ou plus
près de nous Charlotte Calmis, la Mère d’Auroville, Niki de Saint Phalle,
l’éco-féminisme et les Chamanes, Marie-Jo Bonnet ouvre le débat en montrant que
la maternité symbolique fait partie de l’expérience universelle. Elle est à la fois
une alternative à la maternité obligatoire et un moyen d’exprimer son élan
créateur, qu’il soit mystique, artistique ou guérisseur.
Je remercie
la Mairie de Paris et particulièrement Catherine Vieu-Charier, adjointe à la
Maire de Paris chargée de la mémoire et du monde combattant, ainsi que M.
Jacques Boutault, maire du 2e arrondissement, d’accueillir dans le
square Louvois Andrée Jacob et Eveline Garnier, deux grandes actrices de notre
histoire qui ont étonnamment disparu de notre mémoire collective.
Merci de
faire acte de justice, non seulement pour l’histoire des femmes mais aussi pour
l’histoire de la résistance en France, et plus spécialement de ce cher Paris où
elles sont nées, ont vécu et ont travaillé toute leur vie. Savions-nous qu’Andrée
Jacob est à l’origine des panneaux présentant les monuments et sites principaux
de la capitale ?
Il faut dire
qu’Andrée Jacob le connaissait bien, l’ayant arpenté dans tous les sens sous
l’Occupation comme secrétaire de Claude Bourdet, qui était monté dans la
capitale en juillet 1943 pour diriger le réseau Noyautage des Administrations Publiques
(NAP).
Le fait
qu’elles vivaient ensemble rue Rousselet dans le 7e arrondissement,
et qu’elles se sont connues avant l’Occupation, dans le cercle de Jacques
Maritain, l’oncle d’Eveline, y est pour quelque chose. Ce milieu de catholiques
de gauche donnera naissance à Témoignage
chrétien et au numéro spécial sur l’antisémitisme sorti en pleine
occupation. Andrée Jacob est évidemment bien placée pour être alertée et
organiser la résistance. Elle conduira ses parents en zone sud, dans la maison
de Buissière ou habite la famille d’Eveline Garnier, ne portera jamais l’étoile
jaune, et fabriquera des faux papiers pour les Juifs de son entourage. Ariane
Lévery, présente parmi nous aujourd’hui, a pu bénéficier de ces papiers qui lui
ont sauvé la vie, ainsi qu’à sa mère. Elle est d’ailleurs venue avec.
A partir de
1943, le travail s’intensifie. Il s’agit de préparer la libération en
protégeant les membres de l’administration publique résistants. Sans ce travail
incessant de ces chevilles ouvrières de la Résistance, il n’est pas certain que
de Gaulle aurait pu s’appuyer de manière aussi confiante sur une administration
épurée qui posera les fondement du nouvel Etat français.
Grâce à leur
sang froid, quand un certain matin d’avril 1944, la Gestapo est venue frapper à
leur porte, elles ne furent pas arrêtées et purent ainsi reprendre le flambeau
de la direction du réseau Nap en juin 1944, à la suite des arrestations ses
chefs. S’occuper de la logistique, de la gestion des fonds, de la récolte et
distribution des quelques 600 lettres échangées quotidiennement entre les
différents centres de décision de l’insurrection parisienne, sans oublier la
protection des archives, cachées aux Archives nationales ou travaillait
Jacqueline Chaumié.
Elles
représentent l’armée invisible des femmes sans lesquelles la Résistance
n’aurait pas été en mesure de préparer et réussir l’Insurrection parisienne.
Puisque nous
sommes en face de la Bibliothèque nationale, Rappelons l’acte de bravoure
d’Andrée Jacob qui l’a libérée à la tête d’un peleton FFI et fait arrêter
Bernard Faye au moment où il allait s’évader vers les Etats Unis avec des
fichiers importants, comme elle le raconte dans son témoignage conservé aux
Archives nationales.
Après la
Libération, un autre travail tout aussi essentiel les attendait au ministère
des Prisonniers, déportés et rapatriés, dresser un premier fichier des
disparus, et participer à la Mission dirigée par l’historienne Olga Wormser sur
l’identification, la localisation et la recherche des déportés de France. Elle
participera aussi à la constitution de la documentation pour le film Nuit et brouillard d’Alain Resnay.
Il aura donc
fallu 75 ans, pour que ce couple de pionnières du devoir de mémoire et de la
valorisation du patrimoine, ce couple de femmes résistantes mystérieusement
rayées de l’histoire en dépit de leur état de service prestigieux, soit enfin
honorées par notre cité de Paris.
J’espère que les jeunes pourront désormais puiser auprès d’elles la force de résister à l’oppression sous toutes ses formes (politique, religieuse, technologique) pour participer au renouveau si nécessaire de notre monde. Marie-Jo Bonnet, 29 août 2019
Permettez moi de commencer par remercier les artistes qui ont tant œuvré pour l’émancipation. Dans l’indifférence parfois, l’incompréhension mais toujours en suivant leur lumière intérieure. Je suis heureuse de leur rendre hommage par cette grande exposition féministe qui a pu se réaliser dans la ville de Rennes grâce au soutien de Mme Nathalie Appéré, maire de Rennes, et à toute l’équipe du musée dirigée par Anne Dary et aujourd’hui Jean-Roch Bouiller. Rennes, et la Bretagne, se mettent ainsi à l’avant-garde de la reconnaissance des femmes artistes.
Je remercie
le comité scientifique qui m’a accompagnée dans l’élaboration du projet, et qui
a été un lieu chaleureux d’échanges et de réflexion très dynamisant. Je crois
que la relève est assurée.
Un merci
spécial à François Coulon, que j’ai rencontré il y a plusieurs années au musée
alors que je réalisais un Guide des femmes artistes dans les musées de France
et qui a eu l’idée de me proposer cette exposition.
Merci aussi à
Valérie Richard qui a assuré le secrétariat des demandes de prêt avec tant de
compétence avec Macha Paquis, jeune normalienne.
Les éditions
Ouest-France, étaient tout naturellement désignées pour publier le catalogue.
Mathieu Biberon, directeur éditorial et Alice Ertaud, ont réalisé avec
enthousiasme cet ouvrage qui sera la mémoire de l’exposition.
Je suis heureuse d’avoir pu rassembler un ensemble d’œuvres majeures réalisées par les plus grandes artistes, de Camille Claudel à Louise Bourgeois en passant par Elisabeth Vigée Le Brun, dont l’autoportrait en train de peindre a été peu montré en France. En tout 80 œuvres de femmes, du Moyen Age à nos jours, qui sont unies et mises en espace par Eric Morin, dans une perspective émancipatrice.
Le statut des
femmes artistes a fait l’objet, on le sait, d’un long combat. Et pour mieux en
comprendre toutes les implications, nous avons choisi l’organiser l’exposition
autour de cinq grands axes, qui représentent chacun un courant porteur. Comment
se libérer de sa condition féminine en bravant les interdits ? Comment le
portrait et l’autoportrait contribuent à changer l’image sociale des femmes en
oeuvrant pour la reconnaissance des artistes ? Comment les artistes ont
lutté contre les clichés de l’art féminin au point de révolutionner la
tapisserie ? La question de la spiritualité en art comme source d’énergie
créatrice, et enfin la trop prégnante question des violences subies ou comment les
transformer par l’activité artistique pour renaître en sortant du statut de
victime.
Nous voyons
ainsi que les femmes artistes ont réalisé un travail symbolique essentiel, qui
nous concerne tous et toutes et qui se déploie dans l’histoire depuis les
premières visionnaires du Moyen Age, jusqu’à ce Baby carriage de la japonaise Chiharu Shiota.
Nous sommes
en effet en présence d’une exposition de dimension internationale, avec des
artistes issues de nombreux pays, qui permet de réévaluer l’apport des femmes
dans le champ artistique. Nous espérons ainsi remettre en cause la logique d’une histoire de l’art fondée sur les
ruptures avec le passé. Les femmes sont novatrices dans l’emploi des matériaux
non nobles, dans le refus des clivages, l’ouverture à d’autres spiritualités et
le désir d’exprimer un point de vue personnel sur le monde.
Avant de passer la parole à l’association
Histoire du féminisme à Rennes et à H/F Bretagne, j’aimerai dire pourquoi je
leur ai proposé de chanter l’Hymne du MLF au
cours du vernissage. Comme beaucoup d’entre vous, j’ai été bouleversée
d’entendre la chorale de 600 femmes chanter dans le stade de Rennes lors de la
coupe du monde féminine de football cet hymne que j’ai tellement chanté lorsque
j’étais au MLF. Il fait partie de mon cheminement dans la découverte des femmes
artistes, et de ma prise de conscience
de l’inégalité de statut homme-femmes qui les a tant marginalisées. C’est
auprès de Charlotte Calmis notamment et de son association La Spirale que je me
suis éveillée à toutes ces questions, découvrant à quel point l’art est
certainement l’avenir du féminisme dans sa capacité à élaborer un nouveau point
de vue sur le monde et à nous le faire partager.
Je souhaite que cette exposition ouvre de nouveaux chemins d’émancipation dont nous avons tant besoin aujourd’hui.
Qui a composé l’Hymne du MLF? « L’hymne » des femmes a été composé chez Monique Wittig, fin mars 1971 pour un rassemblement au square d’Issy-les-Moulineaux en honneur aux femmes de la Commune dont on fêtait le centenaire. Outre Monique Wittig, il y avait Hélène Rouch, Cathy Bernheim, Catherine Deudon, M.-J. Sinat, Gille Wittig, Antoinette Fouque, Josyane Chanel et Josée Contreras qui se souvient avoir proposé l’air du Chants des Marais qu’elle avait appris en colonie de vacances en ignorant qu’il s’agissait du grand chant des déportés. Témoignage de Josée Contreras, destiné au Colloque « Femmes en chansons », 2010. Pour plus de développement voir MON MLF, par Marie-Jo Bonnet, Albin Michel, 2018.
Les femmes que vous voyez en train de chanter en noir et blanc sont « Le groupe musique du MLF ». la fille qui joue de la guitare, c’est moi. Filmé à Jussieu en 1972, avec Luce Theye, Claudette Davené, Marianne Ilisca,Annie Sinturel (flute et accordéon) et celles dont j’ai oublié le nom mais pas le visage.
Nous voulions enregistrer un disque. Voici la matrice dans le film
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