« Camarades », roman de Brigitte HERMANN

J’ai le plaisir de vous signaler le roman de Brigitte Hermann,« Camarades », qui se passe en 1968 et qui est un des meilleurs romans que j’ai lu sur le sujet.
voici la chronique de Geneviève Senger sur le roman. Bonne lecture

Camarades : éclatant bijou

Le titre du dernier ouvrage de Brigitte Hermann, philosophe et historienne d’art à qui l’on doit, entre autres, un essai sur Kandinsky, annonce la couleur : camarades. Tout un programme. On est loin de l’hymne à l’amitié et au discours lénifiant sur la solidarité et la fraternité. Avec Brigitte Hermann, on est jeté dans la fosse aux lions, et l’action d’ailleurs se déroule à Lyon, ville mythique qui vit périr les martyrs chrétiens, en leur temps.
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Les NOCES entre la PENSÉE et la VIE

Les NOCES entre la PENSÉE et la VIE *
Marie-Jo BONNET

« Il faudrait fêter cet avènement d’une possibilité qui d’elle-même et de force s’inscrit dans la lutte des femmes, des noces entre la pensée et la vie. Ne pas résister à cette fusion est notre chance de participer activement à la mise en place d’une révolution humaine et irréversible ».
anonyme, Le Torchon Brûle n°0, 1970.

Les recherches sur les femmes, l’amour entre femmes et l’homosexualité sont nées dans le double contexte de dés-institution du savoir initié par Mai 68 et de l’extraordinaire bouillonnement culturel qui s’en est suivi. Sans la rupture avec le poids de la tradition universitaire, du mandarinat, des cours magistraux, et du cloisonnement des savoirs nous n’aurions jamais osé présenter des thèses universitaires sur ces sujets. Et sans l’émergence du Mouvement de Libération des Femmes (MLF) et du Front Homosexuel d’Action Révolutionnaire (FHAR), l’Université n’aurait certainement jamais accepté que de tels sujets soient reconnus par l’establishment.
Ce n’est pas pour rien que les femmes du M.L.F. ont proclamé en 1970 « Libération des femmes, année zéro » . c’est sur cette table rase que nous avons pu édifier notre propre demeure en commençant par le commencement : se réapproprier son histoire, à la fois comme sujet, l’engagement politique a fait de nous des actrices de l’histoire, et comme objet de recherche. Dans une université qui occultait complètement l’histoire des femmes derrière la grande histoire, nous avons introduit le Deuxième Sexe, ses combats, sa vie, ses espoirs et son regard sur le monde.
Mais les obstacles ne se sont pas évanouis d’un coup de baguette magique. Après une phase d’investissement collectif de ce nouveau champ de connaissance, les résistances de l’institution ont ressurgi avec force, refoulant ces recherches dans une marginalité, voire un isolement dont nous sortons à peine.
C’est pourquoi mon parcours individuel constitue, avec le recul historique, l’exemple même des difficultés de cette recherche à s’imposer dans le champ commun des connaissances. Parce qu’elles dévoilent des tabous millénaires (l’amour de la femme pour la femme et le rapport des femmes à l’Esprit, au Logos) de tels sujets conduisent fatalement les chercheuses à développer en elles-mêmes ce pouvoir d’incarnation nécessaire à la visibilité des femmes dans la Cité. Continuer la lecture de Les NOCES entre la PENSÉE et la VIE

60 femmes qui ont marqué l’histoire du féminisme

Exposition à la gare Saint-Lazare le 8 mars 1982, organisée par Yvette Roudy, Ministre des droits des femmes, et Michèle Coquillat.

J’ai réalisé la documentation historique, le choix des féministes et des citations.

L’exposition a été reprise en 2002 au Panthéon par Christine Bard.

Lecture de « L’Affaire Guy Môquet »

L’Affaire Guy Môquet. Enquête sur une mystification officielle« , de Jean-Marc Berlière et Franck Liaigre, Larousse, « A rebours », 160 p.

La lecture de l’enquête historique menée par Jean-Marc Berlière et Franck Liaigre sur « L’affaire Guy Môquet » est absolument passionnante pour celles et ceux qui se sont posé des questions sur les motifs de l’héroïsation du « plus jeune fusillé de France ».
Le sous-titre nous donne déjà une réponse : « Enquête sur une mystification officielle ». De fait ! le portrait qu’ils ont dressé à partir d’une recherche rigoureuse dans les archives est très différent de celui qui a été exalté par le Parti communiste, d’abord, puis notre président de la république.
Guy Môquet était-il vraiment un résistant, se demandent les auteurs, c’est-à-dire un jeune homme combattant les intérêts allemands en France ? Continuer la lecture de Lecture de « L’Affaire Guy Môquet »

Approches historiques des sexualités

je participe au séminaire de Sylvie Chaperon et Christelle Taraud:
« Où en est l’histoire des homosexualités? »
Université Paris-1 : 17, rue de la Sorbonne, 75005 Paris (Esc. C, 3e étage droite)

11 décembre 2009 :
16h à 18h, Salle Picard 2:

Marie Jo Bonnet : « Le temps des pionnières est-il révolu ?-
La Libération (des femmes- de la France) comme dynamique de la pensée » ;
et Patrick Cardon, « Initier et développer une praxis de genre : l’expérience TRANSculturelle de l’association GayKitschCamp »

« Lesbiennes, migration, exil et racismes »

Le corps (du texte, de l’amante…) comme espace au-delà des frontières. Lectures de Marguerite Yourcenar et Nina Bouraoui

J’ai choisi deux écrivaines qui semblent particulièrement éloignées dans le temps, l’espace, l’expérience de l’exil et la double culture parce que je souhaite montrer ici la différence entre les frontières qui définissent des territoires, des séparations, des divisions, des clivages identitaires et l’écriture, la peinture, la musique, la pratique créatrice qui agit à la manière d’Eros en reliant, articulant dépassant l’opposition étranger nation.
Il est évident que je ne me situe pas dans une approche historique, ni dans une approche sociologique ou même politique de l’exil des lesbiennes, bien que ma présence ici soit un authentique acte politique de solidarité avec les exilées.
Ce qui m’intéresse est de voir comme une situation existentielle d’exil peut servir de matière à un travail intérieur de dépassement des frontières intérieures. Continuer la lecture de « Lesbiennes, migration, exil et racismes »

« De la CONDITION FÉMININE en MILIEU artistique

je participe à ce Film de Loïc Connansky sur Canal Plus projeté vendredi 30 octobre et en novembre….

avec également Annette Messager, Orlan, Alias Black Market, Camille Morineau, Catherine Bay, Sylvie Blocher, Véronique Hubert, Fabienne Audéoud, Yingmei Duan, Hsia-Fei Chang, Amandine Zaïdi, Régine Cirotteaun, Sophie Denissof, Lili Reynaud Dewar, Marina Abramovic.

SCULPTURE au FÉMININ : autour de Camille Claudel

À LIMOGES, vendredi 11 et samedi 12 septembre,
COLLOQUE à l’occasion de l’exposition « SCULPTURE AU FÉMININ AUTOUR de CAMILLE CLAULDEL« ,
à la Bibliothèque francophone Multimédia de Limoges .

Vendredi: Silke Schauder, Danièle Arnoux, Gérard Bouté, François Claudel.
Samedi: Marie-Jo Bonnet, Diane Watteau et Silvia Lippi.
Médiatrices Jeanne Fayard et Evelyne Artaud

Mon intervention aura lieu samedi sur le thème suivant:

A la conquête de la 4e dimension

En avance sur la révolution féministe des années 1970, les sculptrices nées dans la première moitié du XXè siècle, vont en quelque sorte montrer le chemin d’une nouvelle liberté dans l’espace. Chacune explore une direction nouvelle avec une inventivité remarquable qui marquera le siècle de leur présence créatrice. Germaine Richier, dans le domaine des analogies entre l’humain, le végétal et le minéral, Niki de Saint Phalle avec « Le pouvoir aux nanas » qui redonne toute signification au « vide » et à la joie créatrice, Louise Bourgeois, si proche de l’inconscient, et Marta Pan qui invente un monde flottant, dans le silence propice à la méditation
Quatre créatrices, quatre directions.

« L’art a-t-il un sexe? »

Interview de Ellen Salvi paru dans DS, juin 2009.

L’art a-t-il un sexe ?

M.J. Bonnet : L’art est point de vue sur le monde et ce point de vue est forcément sexué. Un même thème ne sera pas traité de la même façon par un homme et par une femme, comme je l’ai montré dans « Les femmes dans l’art ». Quand Niki de Saint Phalle donne le « pouvoir aux nanas » en réalisant Hon/Elle, une statue de femme monumentale, elle nous invite à entrer à l’intérieur, dans l’invisible. Courbet, en revanche avec L’Origine du monde nous transforme en voyeur de l’interdit. Les deux démarches sont intéressantes, mais très différentes.

Le milieu de l’art est-il sexiste ?

MJB : Ce n’est pas le milieu qui est sexiste, mais le pouvoir artistique, les institutions qui dictent les goûts, les valeurs, la validité d’une démarche. et marginalisent les femmes artistes qui ne sont pas dans le pot commun. Le Centre Pompidou est dirigé par des hommes qui ne prennent aucun risque. La collection compte 16% de femmes, dont 5% sont exposées en permanence En ce sens, elles@centrepompidou me semble rétrograde et vient trop tard. le Musée ne peut prétendre retracer une histoire de l’art du xxème siècle qui occulte des pans entiers de l’apport des femmes comme la tapisserie.

Peut-on dire de la nouvelle génération qu’elle s’est affranchie de ces clivages ?

MJB :Tant qu’il y aura des hommes et des femmes, les œuvres seront sexuées. Ce n’est pas cela qui est dérangeant, ce qui l’est, c’est l’hégémonie du modèle masculin.

Quand Charlotte CALMIS découvrait Séraphine en… 1976

La première fois que j’ai entendu le nom de Séraphine de Senlis c’était en 1976, par la bouche de Charlotte Calmis qui rentrait d’un voyage à Senlis avec sa photo, celle Uhde, et des photos de ses tableaux.
Bouleversée par cette rencontre avec une peinture tellement aboutie, Charlotte Calmis avait écrit un texte qui n’a jamais été publié en France, mais qui fut traduit en américain par Mary Guggenheim, alors en visite en France (« Séraphine de Senlis », by Charlotte Calmis, translated by Mary Guggenheim. Womanart / Winter 77-78, Vol. 2, n° 2).
Comme Séraphine est aujourd’hui reconnue par très large public, je trouve important de lui rendre justice en publiant son écrit pionnier. M.J. Bonnet

On découvre un certain matin du 31 janvier 1932, devant le kiosque de musique du cours Montmorency de Senlis, tout un déménagement étrange: tableaux, couverts, objets, tapis. Le coupable de ce forfait ? Une femme de ménage dite Séraphine Louis.
Elle vient mystérieusement en cette nuit « de se dépouiller de tous ses biens ! » Ils furent achetés avec « son passe temps favori », la peinture.
Séraphine Louis endosse une des dernières formes que cette société lui confère « figure légendaire atteinte de débilité mentale ». Dirigée aussitôt sur un asile elle y végète dans le silence une dizaine d’années, coupable d’avoir réveillé une des puissances énergétiques les plus mal connues de notre univers, les possibilités de création de l’espèce féminine.
Voici éclatés les secrets enfouis depuis des siècles de soumission, de passivité, de long silence. Tout est terminé dit-elle mystérieusement durant ses années de réclusion.
L’oeuvre de Séraphine est une mémoire mythique qui explore. La force créatrice vitale est si forte qu’elle surgira dans cette femme de 42 ans, qui n’avait jamais peint auparavant, toute armée, semble-t-il, de sa propre « technicité » dans l’art de peindre… mémoire mythique, répertoire d’avant partir du paradis.
Ses tableaux d’arbres sont l’ARBRE. Le feuillage est le ciel ; chaque feuille un regard ; d’étranges fruits inquiètent. Tout un archétype explose dans cette inspiration qu’elle écoute, qu’elle nomme, qu’elle décrit.
Oeuvre singulière où s’expérimente une nouvelle expérience du sacré. Des murmures de l’éternité montent « d’avant la grande culpabilité de la femme et du péché originel ».
L’Eden est à regagner et à retrouver l’arbre de la connaissance, aux frontières des rivages interdits, pour accéder à la parole déculpabilisée.
Matière picturale… Matière lourde… Frôlements, chuchotements, palpitations semblent réveiller en nous un monde de sensations endormies et amorphes. Un frémissement orgasmique, un frémissement mystique animent ces surfaces à deux dimensions. Le silence trouve son dialogue.

Charlotte CALMIS, 1977, inédit

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